GUESSOUS : "Zanqa" façonne négativement la présence des femmes dans l’espace public


 « Le concept d'espace public reste fortement associé à des représentations négatives, qui le réduisent à la notion de « Zanqa », ce qui contribue à l’exclusion des femmes qui y évoluent, les considérant comme déviantes par rapport aux normes sociales prédominantes ». Telles sont les grandes lignes de l’intervention animée par la sociologue  Soumaya Naamane Guessous à l’occasion du lancement des activités scientifiques de Menassat pour la saison 2024-2025. Cet événement, organisé au Novotel Mohammedia le 21 septembre, a marqué l’édition de cette nouvelle saison, placée sous le thème : "Quelle place pour la femme dans l’espace public ?". La rencontre, modérée par Khadija Sabil, rédactrice en chef du magazine « Femmes du Maroc », a rassemblé des personnalités de divers horizons, notamment des acteurs associatifs, des académiciens et un nombre important de journalistes issus de plusieurs supports médiatiques.

 

Lors de son intervention, Soumaya Naamane Guessous a rappelé que la première apparition des femmes dans l’espace public marocain date du retour d’exil du roi Mohammed V. Cet événement historique a permis aux femmes de manifester publiquement leur joie aux côtés des hommes, marquant ainsi une rupture avec une époque révolue où la rue était exclusivement masculine. Malgré cette avancée, la sociologue observe que le discours social prédominant continue de minimiser la légitimité des femmes à bénéficier de l’espace public.

 

Par ailleurs, elle a souligné que, l’espace public reste étroitement lié à la notion de « zanqa », et donc, un lieu inapproprié pour les femmes dans l'imaginaire collectif marocain. Selon cette vision stéréotypée, les femmes qui franchissent le seuil du domicile sont souvent qualifiées de « déviantes » ou «  femmes menant une vie de débauche », ce qui selon la sociologue,  contribue à renforcer les inégalités d’accès des femmes à l’espace public.

 

Malgré ces obstacles,  observe Soumaya Naamane Guessous, la présence féminine dans l’espace public a connu des évolutions notables. Les femmes ont progressivement investi des rôles traditionnellement réservés aux hommes, tant en milieu urbain que rural. Cette dynamique témoigne d’une volonté de changement sociétal qui mérite d’être soulignée.

 

Pour conclure, la sociologue a élargi son analyse à l’espace numérique, qu’elle considère également comme un espace public. Toutefois, contrairement à l’espace physique, cet environnement virtuel est, selon elle, devenu un espace d’anomie et de désordre et où l’absence de règles favorise une liberté d’expression parfois abusive.

 

Pour rappel, Aziz Mechouat, directeur du Centre Menassat a souligné que cette rencontre s'inscrit dans le cadre des résultats préliminaires de l’enquête de terrain "Femmes, espace public et libertés individuelles"  menée par le Centre pour la saison 2023-2024.

La dite recherche a couvert un échantillon représentatif de 1 528 Marocains et Marocaines autour de leur représentation par rapport à l’accès des femmes à l’espace public. C’est dans ce sens et avant le lancement officiel du rapport de cette enquête nationale, le Centre Menassat a mené une série de rencontres débats sous le thème : "Femmes, espace public et changements sociaux : entre défis et acquis". L’objectif étant de croiser les regards et d’enrichir les débats autour de ce sujet, notamment à travers le dialogue et les échanges avec divers acteurs intéressés par la question des droits des femmes.