Le Centre Menassat pour les Recherches et les Etudes Sociales, a organisé une activité en date du 22 Octobre 2022 au Novotel Mohammedia, portant sur le sujet de l’avortement, à la lumière des changements sociaux et des contraintes législatives mises en vigueur.
L’activité entre dans le cadre d’une série d’assises « Choix et Alternatives Sociétales » programmées à l’issue du programme JIL, qui est un programme initié par Menassat et qui en est à sa deuxième version.
L’activité a connu la présence effective de la parlementaire du Parti du Progrès et Socialisme Loubna Sghiri, de la journaliste et lauréate du programme JIL Wafaa Beloua, du directeur de Menassat Aziz Mechouat, et de plusieurs personnalités de la sphère, juridique, législative, associative et sociale. L’activité a été modérée par Fatima IKA, qui est membre et chercheure au centre Menassat.
Une première partie de l’activité a connu la présentation d’un bref aperçu sur les résultats de la recherche quantitative autour des libertés individuelles antérieurement effectuée par Menassat durant l’été 2021. Dans cet aperçu IKA s’est arrêtée sur les résultats significatifs des représentations et perceptions des marocains autour de la liberté du corps. Ce dernier est étroitement lié à la question de l’avortement. Dans ce sens, elle a estimé que 78.2% des marocains attestent que chacun peut jouir de sa pleine liberté corporelle, cependant lorsque la question se rattache à la femme, le corps n’est plus individuel mais deviens une propriété collective. Donc le corps féminin reste cadré par des considérations et des représentations sociales, culturelles et religieuses qui entravent les tentatives du recours à l’avortement pour une raison ou une autre. Mais pourtant peuvent le légitimer pour rappeler le corps féminin à l’ordre des normes et règles de la communauté.
En deuxième lieu Wafaa Beloua a présenté le texte du policy-paper, réalisé en collaboration avec d’autres doctorants du programme JIL, et dont l’intitulé :
« La Loi autour de l’avortement à la Lumière des changements sociaux et les contraintes Législatives ».
Le policy-paper en question est un plaidoyer, ou Beloua a estimé que l'avortement est une réalité qui s’impose avec des statistiques alarmantes, du fait du nombre d’enfants abandonnés dans les poubelles chaque jour, du nombre de femmes qui meurent à cause du recours aux résolutions traditionnelles pour se faire avorter, ce qui accentue les dangers. La pénalisation de l’avortement estime-t-elle, n'empêche pas le recours à l’avortement, mais augmente plutôt ses répercussions. Ceci pousse plusieurs voix à s’élever pour trouver un cadre législatif adéquat qui réglemente le recours à l’avortement.
En troisième lieu la parlementaire Loubna Sghiri a fait le bilan des différents plaidoyers que son parti a effectué par rapport au sujet de l’avortement. Loubna Sghiri s’est dite confrontée et impliquée dans la question de l’avortement de par sa position en tant qu’avocate, et qu’elle est pleinement consciente des différentes répercussions sociales de l’avortement. Dans son travail sur le dossier de cette problématique, la parlementaire a avoué que son parti a suggéré l’adoption du terme « Interruption Médicale de Grossesse », au lieu de la notion d’avortement, qui selon elle, porte en elle le poids d’un patrimoine social et tout un héritage culturel traditionnaliste, qui entrave les issues vers la résolution de ce phénomène. Elle a aussi ajouté que son parti a adopté la problématique de l’avortement, et essaye de formuler les moyens et les issues légales pour la résoudre.
En dernier lieu, une séquence audiovisuelle a été lancée, contenant l’intervention de professeur Chafik Chraïbi président de l’Association Marocaine de Lutte contre l’Avortement Clandestin. Chraïbi a estimé que la question de l’avortement est un danger réel pour la femme. Il avoue que la pénalisation légale de ce dernier ne fait qu’accentuer les dangers, dans la mesure où, la femme ne disposant pas de moyens pour avorter, est contrainte de recourir à des moyens illégaux, ce qui ouvre la porte pour un marché noir des avortements clandestins. Ou bien elle recourt aux moyens traditionnels qui menacent la vie de la femme. Professer Chraïbi a proposé pour sa part que l’article de loi 453 qui stipule que : « L’avortement n’est pas puni lorsqu’il vise la santé physique de la femme » peut être une ouverture vers des réflexions sérieuses et constructives au phénomène de l’avortement.